Mondialisation,
gagnants et perdants
Illusoires Objectifs du millénaire
En septembre 2000, le Sommet du millénaire
des Nations unies a adopté une liste d'objectifs destinés
à réduire de moitié la pauvreté entre 1990
et 2015. Ces plans contestés par les USA, et pourtant si modestes,
se révèlent impossibles à atteindre.
Les dirigeants du monde avaient alors "exprimé une détermination sans précédent à mettre un terme à la pauvreté" en dégageant huit Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) : réduire de moitié la proportion de la population au revenu inférieur à 1 dollar par jour et celle souffrant de la faim ; donner à tous les enfants les moyens d'achever un cycle complet d'études primaires ; eliminer les disparités entre les sexes dans les enseignements primaire et secondaire d'ici à 2005 si possible, et à tous les niveaux de l'enseignement en 2015 au plus tard ; réduire des deux tiers le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans ; diminuer des trois quarts le taux de mortalité maternelle ; enrayer la propagation du VIH-sida, du paludisme et d'autres grandes maladies ; assurer un environnement durable (par exemple réduire de moitié la proportion de la population privée d'un accès régulier à l'eau potable, ou améliorer sensiblement la vie d'au moins 100 millions d'habitants de taudis) ; mettre en place un partenariat mondial pour le développement.
Le bilan intermédiaire est très
mitigé. Selon le rapport du Programme des Nations unies pour le
développement (PNUD) de 2004, on constate un "progrès
rapide pour certains, mais des reculs pour un nombre de pays sans précédent".
Par rapport à ces objectifs, l'Asie évolue dans le bon
sens, mais globalement "seuls deux des objectifs, diviser par deux le
pourcentage de population très pauvre et de population privée
d'un accès à une source d'eau aménagée, pourront
être respectés si l'on en reste au rythme de progression des
dix dernières années (...). Mais même la progression
concernant ces objectifs est essentiellement due au développement
rapide de la Chine et de l'Inde". Ces deux pays ont d'ailleurs enclenché
ce développement économique sans appliquer à la lettre
les recommandations du Fonds monétaire international (FMI) et de
la Banque mondiale...
Tragique recul
Ailleurs, et notamment en Afrique, la partie est déjà perdue : "Au rythme actuel, l'Afrique subsaharienne ne respectera l'objectif de la scolarisation universelle dans le primaire qu'en 2019, ou l'objectif concernant la réduction de la mortalité infantile des deux tiers qu'en 2106, dans cent ans, au lieu des onze ans qu'exigeraient les objectifs. Pour trois des objectifs, la faim, la pauvreté et l'accès à l'eau, on ne peut même pas fixer de date, car la situation dans la région, loin de s'améliorer, est en train de se dégrader." Voilà pourquoi "au-delà des moyennes régionales on découvre de nombreux reculs tragiques. Bien des pays ont vu leur situation commencer à se dégrader dans les années 1990. Pour 46 pays, les gens sont plus pauvres aujourd'hui. Pour 25 pays, les gens ont plus faim aujourd'hui qu'il y a dix ans".
Plus surprenant, les OMD (Objectifs du millénaire
pour le développement) ne laissent pas le choix des moyens à
mettre en oeuvre : " Poursuivre la mise en place d'un système
commercial et financier multilatéral ouvert, fondé sur des
règles, prévisible et non discriminatoire. (...) En coopération
avec l'industrie pharmaceutique, rendre les médicaments essentiels
disponibles et abordables dans les pays en développement. " Les
OMD s'inscrivent donc dans la démarche néolibérale
d'ouverture des économies aux sociétés transnationales
et aux capitaux internationaux, pour atteindre un autre objectif, inavoué
celui-là : légitimer la logique économique dominante
tant décriée.
Ainsi, non seulement le but affirmé est
bien terne face à l'enjeu, la satisfaction universelle des besoins
fondamentaux, mais surtout les OMD imposent discrètement la mise
en place de recettes économiques qui ont déjà fait
la preuve de leur échec en termes de réduction de la pauvreté
partout où elles ont été scrupuleusement appliquées.
Dès lors, il ne s'agit que de panser les
graves blessures infligées par un modèle économique
structurellement générateur de pauvreté. Avoir pour
seule revendication les OMD revient donc à accepter et à
renforcer les fondements de ce système injuste. Au-delà
d'un échec retentissant pointe la supercherie des Objectifs du millénaire
pour le développement : dès le départ, ils n'avaient
aucune chance d'être atteints, car ils refusent de mettre en cause
le cadre économique actuel qui les a rendus nécessaires.
Inventaire...
Budget des USA pour l'aide au développement en 2003 : 16 milliards $
Budget nécessaire pour que l'Afrique atteigne les Objectifs du millénaire en 2015 : 25 milliards $
Dépenses mondiales de parfums et cosmétiques en 2003 : 33 milliards $
Coût annuel de la guerre en Irak : 180 milliards $
Subventions agricoles des pays riches en 2003 : 245 milliards $
Dépenses mondiales pour la publicité en 2003 : 446 milliards $
Dépenses militaires des pays riches en
2003 : 616 milliards $
Sources : International Institute for Strategic
Studies (IISS) ; Oxfam International ; Amnesty International ; Development
Assistance Committee of the OECD ; African Development Bank (ADB) ; Worldwatch
Institute.
Sur la Toile
Action mondiale contre la pauvreté
Comité pour l'annulation de la dette du tiers-monde (CADTM)
Institut universitaire d'études du développement (IUED)
Objectifs du millénaire pour le développement (OMD)
Programme des Nations unies pour le développement (PNUD)