Voici un événement important passé
presque sous silence, ou dénaturé,
par les médias occidentaux...
Dans la nuit du 25 au 26 décembre 1990, l'Ibn Khaldoun est arraisonné
dans le Golfe alors qu'il fait route vers l'Irak. A son bord: 242 femmes
et enfants, en majorité arabes, mais aussi d'Europe et d'Amérique.
La ligue des femmes arabes et des associations de femmes jordaniennes,
palestiniennes, irakiennes, libanaises, syriennes, algériennes,
tunisiennes et yéménites avaient décidé de
collecter et d'apporter du lait, de l'alimentation et des médicaments
pour aider les enfants irakiens victimes du blocus. Ces femmes veulent
"que la négociation remplace la guerre et que l'on stoppe l'embargo
de l'alimentation et des médicaments qui représente déjà
une forme de guerre à l'égard des populations".
Parti le 6 décembre d'Alger, le "bateau des femmes" fait escale
à Tunis, Tripoli, Port-Saïd, Port-Soudan, El Hodeïda,
Aden et Port-Qabous (Oman). A plusieurs reprises, des bâtiments et
engins de guerre de la force multinationale opèrent des manoeuvres
d'intimidation.
"Le 26 décembre, à quatre heures du matin, la sirène
a retenti sur l'Ibn Khaldoun: nous étions cernés par dix-huit
unités de guerre américaines", raconte Oum Nasser, présidente
de la Ligue, qui dirigeait l'expédition. "Nous sommes toutes montées
sur les ponts pour montrer qui nous étions. Nous étions convaincues
que, grâce aux conventions de Genève, il ne nous serait fait
aucun mal. Nous agitions nos banderoles sur lesquelles était écrit
qu'on ne peut pas affamer les enfants. Soudain, des myriades d'hélicoptères
décollent des bateaux et 450 Marines descendent par des filins sur
l'Ibn Khaldoun."
"Ils étaient tous habillés de combinaison noire, armés
jusqu'aux dents et maquillés sur le visage avec des rayures noires,
jaunes et rouges, certains portaient des masques en caoutchouc.
Ils tiraient en l'air et une fois débarqués, ils ont
commencé à faire des grimaces et à nous pousser.
Ils mâchaient tous du chewing-gum, ils étaient grands
et excités! Ils n'arrêtaient pas de hurler: "No pictures,
no pictures!". Ils ont cassé tous les appareils photo et commencé
à taper sur les femmes qui en possédaient. Ce fut comme un
signal, ensuite, ils nous ont frappées avec la crosse de leurs fusils."
Apparemment, cet événement offrait tous les ingrédients susceptibles d'intéresser les médias occidentaux pour un reportage-choc: déploiement militaire, suspense, violences contre des femmes... Mais l'affaire sera passée sous silence par la majorité des médias et complètement dénaturée par d'autres, faisant comme s'il s'agissait simplement d'un cargo irakien tentant de contourner le blocus. Le journal Le Monde y consacrera 4 petits paragraphes, recopiant la version du commandement américain. Le quotidien belge Le Soir enterrera l'affaire en 15 lignes, soigneusement enfouies dans un article fourre-tout et cachant systématiquement tous les aspects choquants...
...Voici ce que cela devient dans nos médias:
Le Soir, 27 décembre 90
Parallèlement, l'opération de supervision de l'embargo
s'est traduite dans la nuit de mardi à mercredi par l'abordage agité
d'un cargo irakien, l' "Ibn Khaldoun", (Ce paragraphe, enterré dans
un article traitant de tout autre chose, recopie la seule version officielle
US. La présence de 242 femmes et enfants de tous pays, porteurs
d'un message de paix, est passée sous silence.)
accusé de transporter notamment du sucre et du riz vers le port
de Bassorah. (Pas un mot sur le transport de médicaments. Quant
aux vivres, Le Soir écrivait par ailleurs que "l'Europe n'a nullement
l'intention d'affamer la population irakienne"...)
L'interception, qui a duré une demi-heure, s'est faite par bateau
et par hélicoptère; les soldats américains, britanniques
et australiens engagés dans cette opération ont dû
recourir aux tirs de semonce, à des grenades lacrymogènes
et détonantes...(Qui les y obligeait? Rien sur les femmes violentées
par les Marines).